mercredi 22 septembre 2010

Des vampires, encore des vampires...


(merci à Bdgest pour l'image - 
Parce qu'évidemment, l'album n'est plus édité sous cette forme... Grmf...!)


Résumé : un adolescent vampire, âgé de cinq mille ans, est ramené dans le monde des vivants après cinquante ans de repos. Il redécouvre une société qui a bien changé, mais se heurte à Ahmasi, son ennemie ancestrale, devenue vampire en même temps que lui.


1993, quelque part aux États-Unis. Au cours de travaux, des collecteurs souterrains d'égouts sont réouverts après être restés scellés cinquante ans. Le soleil darde ses rayons dans la cavité laissée un instant béante et ramène à la vie un squelette gisant là à l'abandon. Notre revenant est un garçon de douze ans en apparence, mais qui se révèle en fait être un vampire âgé de cinq mille ans. Un vampire, oui, mais qui n'aspire qu'au repos, et qui est condamné à vivre par une lumière du Soleil à la fois bienfaitrice et malédiction. Il est aussi atteint d'une fringale de premier ordre : le statut d'immortel lui donne certes un corps à la force surhumaine, mais un corps qui réclame des repas pantagruéliques à intervalles réguliers. Avec tout cela, on aurait pu s'attendre à un être maléfique, distillant son venin dans l'obscurité après des décennies d'emprisonnement... Et bien non : malgré son âge, ce garçon sans nom reste un ado un peu caractériel (un pléonasme, me direz-vous) mais pas foncièrement mauvais, ni foncièrement bon d'ailleurs. Bilan : avec la subtilité dont font souvent preuve les énergumènes sus-cités, il a tôt fait de se faire rattraper par les médias, qui se gargarisent alors de vampires en gros titres. Rajoutez à cela une ennemie de toujours (perfide, méchante, immorale, déjantée et tout et tout) qui le poursuit de sa haine depuis des millénaires, et voilà une immortalité qui ressemble plus à une punition qu'au panard total auquel les romans ou les films ont fini à nous habituer. Heureusement  (il faut bien un peu de positif, dans la vie) que notre petit héros rencontre un vieil indien et sa fille, derniers représentants de leur race. Cette rencontre lui sert de point d'ancrage dans l'humanité : le vieil Ours Calme l'accepte pour ce qu'il est, sans préjugé. Et puis, en voilà, une belle cause à défendre, ça, la lutte contre de vils spéculateurs qui n'hésitent pas à employer la force pour chasser des indiens sans défense de leur ultime refuge et de leur dernière fierté : un appart' à la vue imprenable, au sommet du plus haut gratte-ciel de la ville...




Bon, vous l'aurez compris, le scénario se laisse aller à quelques passages un peu convenus, quelques exagérations dans les situations... Tout se déroule de manière un peu trop lisse. Mais que cela ne fasse pas oublier la qualité d'une histoire par ailleurs fort habilement racontée. Pas de prétentions au génie, qui exploserait sur chaque planche. Mais un récit prenant et bien rythmé, qui revisite encore (dix ans après sa première parution française) avec originalité le mythe décidément increvable des buveurs de sang. Les auteurs nous décrivent une société individualiste en pleine décomposition, où les gens normaux forment un arrière-plan presque invisible, ce qui fait ressortir avec d'autant plus de force les petits voyous, les tordus, les mafieux... Notre vampire-enfant, confronté à cet environnement, passe alors pour angélique. Ce qu'il n'est pas. Cette exploration des bas-fonds de l'Amérique (mais ça aurait pu se passer à Gotham City, pour ce que j'en vois) n'est pas sans une certaine touche d'humour, humour surtout basé sur le comique de situation. Inutile de discourir longtemps sur les tenants et aboutissants de l'histoire : elle ne s'y prête pas. On reste dans l'épidermique et dans l'instant. Vite lue, vite oubliée, cette aventure tient toutes ses promesses et mérite largement d'être découverte, pour ceux qui ne l'ont pas encore feuilletée.





Le graphisme simple et clair est porté par un trait de feutre rapide et clair, qui va à l'essentiel, rehaussé par de grands aplats de noir. Pas de foisonnement de détails qui rendent l'image dure à lire. Au contraire, une simplicité qui donne parfois un air enfantin au dessin. La ligne claire dans toute sa splendeur, et un N&B qui ne laisse aucune concession à la grisaille. Le dessinateur met en scène des personnages excessifs, très expressifs, à la limite du manichéisme. Ça peut perturber ; on apprécie ou on reste de marbre dès le premier coup d'œil. En tout cas, ce parti pris graphique rend la lecture rapide et sans ambiguïté. L'histoire se dévore d'une traite, bien servie par un cadrage classique, qui laisse toutefois de la place à quelques planches particulièrement élégantes ou visuellement percutantes.

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Au final, une histoire de vampire / super-héros qui n'a nul autre objectif que de faire passer un bon moment de détente, et qui se donne les moyens de le faire. On aurait pu s'attendre à plus d'envergure au niveau du scénario, mais l'ouvrage reste quand même au-dessus de la production de BD moyenne. A lire si l'occasion se présente, donc : satisfait ou satisfait (ça, c'est de la garantie !)

TRILLO / RISSO, Je suis un vampire, tome 1 : résurrection, Albin Michel, 2000
Réédité en petites intégrales chez Drugstore (ça, c'est une bonne nouvelle)

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